- Coucou tout le monde.
- Ah tiens ! Coucou toi ! Ca va ?
- Ca va…Ca va. Vous aussi dites-donc, ça cause ici.
- Normal, c’est un forum. Bon, les news ?
- …. Attends, j’prends une clope…. Ca fait bizarre de revenir ici, dans un endroit qui fut si familier. C’est comme retrouver un coin de son enfance, sauf que l’enfance, ça fait seulement 10 jours que je l’ai quittée.
- Comment ça ? Je ne comprends pas.
- Tu vois, c’est bizarre… Attends, j’prends un cappuccino…
(…)
- Bon alors ???!!!
Alors ? Bip-bip Zorro est arrivéééeeu…. Sans s’presser-é-eu… Le grand Zorro, le beau… Pardon. Rien ne presse désormais. Puisque tout va bien. Alors je prends le temps. Le temps de vivre. Enfin.
Pour faire rapide : zéro baclo depuis le 1er novembre 2017. Suis-je guérie ? Grande question. Je pense que oui mais comme chat échaudé craint l’eau froide, je reste vigilante, sans obsession. Hier je discutais avec un ancien drogué. Il se disait guéri, mais toujours toxico, tu saisis la nuance ? Quand tu t’es vu hyper fragile à un moment de ta vie, t’as beau en être sorti plus fort que jamais, tes antennes restent toujours prêtes à se dresser au-dessus de ton cerveau d’ex toxico, ex TCA, ex dépressif, ex machin-chose. Et c’est tant mieux. Parce que tu as gagné en conscience. Ton regard s’est aiguisé. Et parce que tu as connu la maladie, tu apprécies la santé. Ca semble tout bête, dit comme ça…
Pour faire long :
Vers septembre 2016, alors que je baissais le baclo, j’ai eu des bouffées d’angoisses. Mais graves les bouffées. Au revoir la zénitude façon Bob Marley. Si bien que je me suis tournée vers l’hypnose Eriksonnienne durant les mois suivants. Et rebonjour la zénitude, cool man. Aujourd’hui, je médite matin et soir, plus une séance d’autohypnose en cas de besoin. Tous les soirs, au moment du coucher, je dis Merci. A plein de trucs, et maintenant je dors 6h d’affilées sans anxiolytiques. Les anxio, j’en prends encore parfois, faut pas croire que tu te transformes en Super Woman comme ça d’un claquement de doigts, on n’est pas au pays de Oui-oui hein…
Je mange quand j’ai faim. Le dimanche, c’est la « journée gâteaux » : viennoiserie le matin au retour du marché, pâtisserie l’après-midi. Mais des fois je prends pas de viennoiserie, ça me hausse le cœur. Je n’ai plus acheté de paquets de biscuits depuis des lustres. La dernière fois que j’en ai mangé, c’était en septembre 2016 parce que mon mec m’en avait acheté des bons, artisanaux, pensant me faire plaisir. Et comme on s’aime, je les ai mangés avec plaisir, sauf que ça m’a pris plus d’une semaine à les finir. Aujourd’hui, quand je regarde des pubs à la télé, que ça réveille des souvenirs, je me fais l’effet d’une rescapée ; et comme il me reste un peu d’empathie, je pense à tous ceux et toutes celles qui vivent encore cet enfer. Oh my god…. La société crée vraiment sa propre intoxication, avec toute cette bouffaille. Et encore, y’a pas l’alcool, pas les médocs (du moins les durs), les clopes. Alors je pense aux Ricains, qui eux ont tout ça sous les yeux. On n’est pas sortis de l’auberge. Et puis comme c’est le printemps, v’là t’y pas que les produits amincissants réapparaissent sur l’écran. Le gros foutage de gueule, tu sais ça.
Je suis restée gourmande – je n’oublierai jamais la petite mise au point à ce sujet par Sylvie. Comme elle a eu raison ! J’apprécie de manger un hamburger (tous les 15 jours environ) ou un kébab l’hiver. Un mini sandwich au pâté à midi. Ou un mini sandwich au camembert-qui-pue le soir parce qu’ayant gardé mes horaires de nuit, je dine très tôt, à 18h au plus tard, donc petite faim vers 23h, c’est normal et pas du tout culpabilisant.
Mais surtout, j’ai compris qu’une pomme à 80 kcal était bien plus nutritive qu’une barre de céréales allégée à 120 kcal. Ou une banane, ou une orange… Muaaah les radis, les branches de céleris, la salade verte… Si mon chien aime, c’est que ça doit être bon.
Et toujours deux mugs de Cappuccino par jour, puisque je n’ai pas pu reprendre le café, seulement 4 demi tasses par jour (alors qu’avant le traitement, c’était 1,5 l). Aaah le cappuccino, LA grande découverte du temps de la grimpette vers le Mont Baclo. Ca réchauffe, c’est bon, tout juste sucré mais pas trop, délicieux… « Le cappuccino c’est la vie, mesdames et messieurs ! ». Je m’égare…
J’ai fait de la musculation en salle. Ca m’a rappelé la dernière fois où j’y avais mis les pieds, quand j’étais obèse et complexée. Le gros changement de perspective ! Pourtant, j’avais rencontré des gens sympas mais bon, quand tu te trouves très moche et très con… Là , le plaisir total, l’amour pour son corps qui te donne des résultats, qui bouge, qui est vivant après tout ce que tu lui as fait subir pendant 30 ans, t’imagines ? Tu es tellement bien, tellement heureuse que les gens viennent à toi, tout naturellement, pour plaisanter ou te demander : « Excusez-moi, elles servent à quoi ces machines là ?… ». Ainsi, j’ai perdu les 8 kilos suite à ma guérison. Oui, parce qu’on peut grossir en n’étant plus boulimique. C’est paradoxal. Mais logique : tu as toute une éducation alimentaire à revoir. Tu croyais tout savoir mais en fait non, puisque tout était faussé. Quand j’avais faim, j’avais peur de réveiller mon craving. Le travail physique (avec la musculation) et émotionnel (avec l’hypnose) ont calmé cette peur puisque j’ai de nouveau appris à aimer mon corps et mon âme. Et tout est rentré dans l’ordre.
Suite à l’hypnose, ma timidité s’est envolée vers des cieux où je n’irai jamais la chercher. C’est comme un ES que je n’attendais pas. Inespéré. Complètement libératoire. Le résultat est que je discute avec de parfaits inconnus, en toutes circonstances, et avec le sourire, voire des éclats de rire. Déjà que je riais beaucoup suite à ma guérison de la dépression alors maintenant, prépares tes boules Quiès !
L’hypnose m’a fait bosser autour de « l’enfant blessé », qui va très bien maintenant. Sur l’hyperémotivité, à différencier de l’hypersensibilité – à laquelle je n’ai pas touché lorsque j’ai compris qu’elle était un outil de travail artistique.
Je n’ai pas encore arrêté de fumer mais je remercie la personne qui a posté au sujet de la Cystisine. Ca m’a fait rire car l’en tête du post était « SURTOUT NE PAS DIFFUSER » etc. Or, le forum étant méga bien référencé, lorsque tu tapes CYSTISINE sur Google, tu tombes sur le post ahah ! Grâce à cette personne, très bientôt j’arrêterai.
En fait, voilà , le Baclofène m’a libérée dans le sens où j’ai enfin du temps pour penser à la vie. C’est dingo le temps qu’occupe une addiction. Sans addiction, tu peux enfin envisager de faire du deltaplane, du yoga, écrire, peindre, dessiner, prendre des cours d’éducation canine, des cours de percussions, inviter des gens à jouer d’instruments de musique pendant que d’autres potes artistes et toi-même on se lance un défi du genre : « Tiens, voilà une lampe de bureau. Qu’est-ce que ça nous évoque ? » (j’ai vu ça un jour en regardant la chaîne Museum, c’était marrant. Y’en a un qui a dessiné un oiseau, un autre un robot, un autre un bâtiment architectural).
Tu entres dans une galerie d’art, tu te fais rembarrer par un jeune mais c’est pas grave, tu rentres dans une autre galerie où d’autres gens te conseillent d’envoyer un book par mail. De telles expériences, ça développe ton imaginaire : depuis j’ai envie d’écrire des histoires surréalistes avec un penchant pour le Dadaïsme. En clair, raconter l’improbable avec humour puisqu’au fond, tout ça n’est pas bien grave.
Et puis tu vas voir des expos alors qu’autrefois tu ne te sentais même pas digne de donner ton avis, même gentil, même obséquieux… Tu oses même dire à ton conseiller Emploi : « je ne veux plus faire ce métier, parce que je suis sourde et que j’en ai marre de faire toujours des efforts » (plus gentiment, bien sûr).
Et puis un jour, une jeune femme écrit : « j’ai lu tel livre, ça m’a donné envie d’aller sur le forum ». Et là , tu planes….