Bonjour à tous,
Premiers mots sur ce forum après de longs moments de lecture...
Nouvelle démarche dans mon long combat contre les TCA. Si cela pouvait être la dernière.
J'ai 43 ans et 30 années de troubles alimentaires avec moi.
J'avais 12 ans quand mon frère est décédé à l'âge de 15 ans. Je marque là le début de mes troubles.
Alors que ma sœur aînée a "géré" sa douleur en accumulant toutes les bêtises qu'une ado peut imaginer, je suis devenue celle qui devait ne pas poser de problèmes à mes parents. Personne ne m'a imposé ce rôle, je l'ai décidé. Mes parents avaient leur chagrin à gérer, ma sœur occupait la case "déconnades", je me suis effacée.
Scolarité sans souci, comportement irréprochable, décisions raisonnables. "Avec Paoline, au moins, on n'a pas de problème" était le leitmotiv de mes parents.
A 13 ans, je décide de perdre mes kilos en trop. Un carré de cabillaud bouilli et une endive sans assaisonnement ont constitué mon seul repas quotidien pendant 2 mois. 17 kilos perdus: mes parents sont fiers de ma volonté. Moi, je longe les murs pour ne pas tomber. Je ne dors pas avant tard dans la nuit, je m'endors littéralement le nez sur mes livres ouverts.
17 ans, je rencontre V. à la veille de l'entrée à l'université. Elle est maigre, j'admire, moi qui ne suis que d'un poids normal.
J'apprends qu'elle vomit, j'apprends à vomir.
"Bonjour, moi, c'est Paoline!"
"Bonjour, moi, c'est Boulimie: on va faire une longue route toutes les deux, autant s'appeler par nos prénoms".
20 ans, ma nouvelle et désormais très attentionnée meilleure amie invite des copines dans notre duo: les crises d'angoisse. Je ne peux pas me planter, la pression est forte à l'unif. Je dois bosser pour payer une partie de mes études. Je dors peu, je bosse, j'étudie, je mange, je vomis, je pleure et me cache dans les armoires de ma chambre pour échapper à mes terreurs.
Je deviens folle, je me sens devenir folle. Je consulte mon premier psy. A la deuxième entrevue, il me demande comment cela se passe point de vue nourriture. "Non, mais oh, de quoi il se mêle celui-là "? Je n'y retournerai pas...
23 ans, je termine mes études. J'ai une distinction. Fière, moment rare, mais éphémère. Mon petit papa chéri en apprenant que j'ai une distinction me dit "Ce n'est pas grave, on ne le dira à personne". Merdum, j'ai loupé la grande distinction. Imbécile que je suis.
26 ans, je découvre Internet. Je lis, j'explore, je tapote le prénom de ma meilleure amie sur le clavier, je pleure, je ris, je vomis donc je suis. Si je ne vomis plus, qui suis-je? Dur... Je rencontre L., ancienne boulimique, grâce à un forum. Ah bon? On peut se séparer de cette partie de soi? Ah bon, c'est une maladie et pas seulement, une faiblesse, une fainéantise, une faute, une honte... Mais c'est ma meilleure amie, ma béquille, sans elle, je ne peux pas. Et puis, je ne fais de mal à personne!
L: Mais si Pao, tu fais du mal à quelqu'un!
Pao: Mais non, L. Je t'assure, personne ne sait, donc personne n'en souffre!
L: Et toi, Pao, tu n'es pas une "personne" ?
Je suis une personne. J'ai le droit. De lever la tête, de choisir par envie et pas par défaut. J'ai le droit d'exister.
Une TS pour vérifier que c'est pas plus simple de ne plus exister que d'exister.
Psychanalyse. 5 ans.
Je veux des enfants, la psy me dit que je ne suis pas prête. J'arrête ma psychanalyse. J'en ai marre qu'on me dicte ma conduite, d'être punie...
Je dois passer par la procréation médicalement assistée. Je m'accroche. Je vomis tous les jours jusqu'au jour de l'accouchement. Honte, culpabilité, marre de voir ma gueule dans l'eau de la cuvette des WC. J'ai ma fille. Elle est parfaite. Victoire. Pour fêter ça, enfin vous savez...
Sophrologie.
Ouais bof... j'ai autre chose à faire! Je peux amener du boulot pendant les séances? Non, pfff...
Kinésiologie.
C'est sérieux? Vous croyez à ce que vous dites, m'sieur?
Hypnose.
Respect. Mes angoisses s'apaisent sans commune mesure. On apprécie ma meilleure copine et moi. Elle en ricane d'ailleurs. elle aime tant ça, qu'on fête ça toutes les deux!
Médecins nutritionnistes. 2.
"Vous ne pouvez pas m'aider. Ok, je sais. Mais je suis si fatiguée!"
Thérapies brèves. 3. Non, non, non.
Psychiatre, il y a 10 jours... Comment vous dîtes? Ba-clo-fene?
Premiers mots sur ce forum. J'espère ne pas vous avoir ennuyé.
Pao.
Message édité 3 fois, dernière édition par Paoline, 25 Avril 2016, 23:02
Premiers mots sur ce forum après de longs moments de lecture...
Nouvelle démarche dans mon long combat contre les TCA. Si cela pouvait être la dernière.
J'ai 43 ans et 30 années de troubles alimentaires avec moi.
J'avais 12 ans quand mon frère est décédé à l'âge de 15 ans. Je marque là le début de mes troubles.
Alors que ma sœur aînée a "géré" sa douleur en accumulant toutes les bêtises qu'une ado peut imaginer, je suis devenue celle qui devait ne pas poser de problèmes à mes parents. Personne ne m'a imposé ce rôle, je l'ai décidé. Mes parents avaient leur chagrin à gérer, ma sœur occupait la case "déconnades", je me suis effacée.
Scolarité sans souci, comportement irréprochable, décisions raisonnables. "Avec Paoline, au moins, on n'a pas de problème" était le leitmotiv de mes parents.
A 13 ans, je décide de perdre mes kilos en trop. Un carré de cabillaud bouilli et une endive sans assaisonnement ont constitué mon seul repas quotidien pendant 2 mois. 17 kilos perdus: mes parents sont fiers de ma volonté. Moi, je longe les murs pour ne pas tomber. Je ne dors pas avant tard dans la nuit, je m'endors littéralement le nez sur mes livres ouverts.
17 ans, je rencontre V. à la veille de l'entrée à l'université. Elle est maigre, j'admire, moi qui ne suis que d'un poids normal.
J'apprends qu'elle vomit, j'apprends à vomir.
"Bonjour, moi, c'est Paoline!"
"Bonjour, moi, c'est Boulimie: on va faire une longue route toutes les deux, autant s'appeler par nos prénoms".
20 ans, ma nouvelle et désormais très attentionnée meilleure amie invite des copines dans notre duo: les crises d'angoisse. Je ne peux pas me planter, la pression est forte à l'unif. Je dois bosser pour payer une partie de mes études. Je dors peu, je bosse, j'étudie, je mange, je vomis, je pleure et me cache dans les armoires de ma chambre pour échapper à mes terreurs.
Je deviens folle, je me sens devenir folle. Je consulte mon premier psy. A la deuxième entrevue, il me demande comment cela se passe point de vue nourriture. "Non, mais oh, de quoi il se mêle celui-là "? Je n'y retournerai pas...
23 ans, je termine mes études. J'ai une distinction. Fière, moment rare, mais éphémère. Mon petit papa chéri en apprenant que j'ai une distinction me dit "Ce n'est pas grave, on ne le dira à personne". Merdum, j'ai loupé la grande distinction. Imbécile que je suis.
26 ans, je découvre Internet. Je lis, j'explore, je tapote le prénom de ma meilleure amie sur le clavier, je pleure, je ris, je vomis donc je suis. Si je ne vomis plus, qui suis-je? Dur... Je rencontre L., ancienne boulimique, grâce à un forum. Ah bon? On peut se séparer de cette partie de soi? Ah bon, c'est une maladie et pas seulement, une faiblesse, une fainéantise, une faute, une honte... Mais c'est ma meilleure amie, ma béquille, sans elle, je ne peux pas. Et puis, je ne fais de mal à personne!
L: Mais si Pao, tu fais du mal à quelqu'un!
Pao: Mais non, L. Je t'assure, personne ne sait, donc personne n'en souffre!
L: Et toi, Pao, tu n'es pas une "personne" ?
Je suis une personne. J'ai le droit. De lever la tête, de choisir par envie et pas par défaut. J'ai le droit d'exister.
Une TS pour vérifier que c'est pas plus simple de ne plus exister que d'exister.
Psychanalyse. 5 ans.
Je veux des enfants, la psy me dit que je ne suis pas prête. J'arrête ma psychanalyse. J'en ai marre qu'on me dicte ma conduite, d'être punie...
Je dois passer par la procréation médicalement assistée. Je m'accroche. Je vomis tous les jours jusqu'au jour de l'accouchement. Honte, culpabilité, marre de voir ma gueule dans l'eau de la cuvette des WC. J'ai ma fille. Elle est parfaite. Victoire. Pour fêter ça, enfin vous savez...
Sophrologie.
Ouais bof... j'ai autre chose à faire! Je peux amener du boulot pendant les séances? Non, pfff...
Kinésiologie.
C'est sérieux? Vous croyez à ce que vous dites, m'sieur?
Hypnose.
Respect. Mes angoisses s'apaisent sans commune mesure. On apprécie ma meilleure copine et moi. Elle en ricane d'ailleurs. elle aime tant ça, qu'on fête ça toutes les deux!
Médecins nutritionnistes. 2.
"Vous ne pouvez pas m'aider. Ok, je sais. Mais je suis si fatiguée!"
Thérapies brèves. 3. Non, non, non.
Psychiatre, il y a 10 jours... Comment vous dîtes? Ba-clo-fene?
Premiers mots sur ce forum. J'espère ne pas vous avoir ennuyé.
Pao.
"Je vis ma vie en éternel point d'interrogation. Je vis dans sa courbe et ma chute me renvoie toujours vers le haut, comme un toboggan perpétuel. Un jour peut-être, aurais-je moins d'élan, moins d'allant et je desecendrai paisiblement vers le point" CG, 2001.