Dimanche potes
Ce dimanche a été réservé depuis des mois. Un très grand ami français qui travaillait à Maurice et qui maintenant a un gros contrat en Afrique est venu en vacances avec sa famille et nous nous faisions une telle joie de nous revoir.
A l’arrivée, je ne lui ai pas fait l’accolade comme avant. Il me regarde, ne dit rien. Il arrive avec deux très bonnes bouteilles. Moi, ne buvant plus, j’avais oublié d’acheter du vin et du me dépanner dans un mini super marché du coin avec du vin pas top. Passons.
A l’apéritif, je refuse le vin blanc en lui disant que je suis au vert. Au vert toi ? Me dit il ? Bon d’accord. Il me sert quand même un verre que je ne terminerai pas.
La bouteille de blanc est entamée à moitié, il ouvre la si belle bouteille de rouge, elle sera bue à moitié aussi. Mon ami aime le vin partagé. Durant le repas, pas d’éclats de rire comme avant, pas de belles réparties ou de coups de gueule de ma part ou de polémiques ; jeu que j’adore. Je suis plate.
L’ami – vrai ami- me regarde, m’écoute, ne comprend pas mon comportement. Je suis sans réaction, sans sourire, sans discussion, sans intérêt. Plate.
Il y a quelques années, j’ai plusieurs fois voulu lui parler de mon alcoolisme profond, je ne l’ai pas fait, j’avais encore honte à l’époque et surtout, il m’aurait dit de lever le pied, ce dont j’aurais été bien incapable.
En partant, il me prend dans ses bras : « qu’est ce qui t’arrive, je ne te reconnais plus, tu as besoin d’aide ? »
Je lui réponds que je lui téléphonerai avant qu’il reparte et qu’on parlera. Il me dit qu’il y tient beaucoup. Il part, me fait un clin d’œil en signe de complicité et d’amitié.
Après son départ, je fais un flash back. Je suis mal. Je me rends compte à quel point je suis dans la camisole chimique, j’ai un de ces cafards. Je vais à la salle de bain pour me regarder devant le miroir, je me rends compte que j’ai un masque sur le visage. Mes traits sont figés. Je fais des grimaces pour voir si je sais encore sourire, me fâcher… etc. Oui, en grimaçant, ca marche, mais dans la réalité, ca ne marche plus.
Où sont mes fous rires d’avant, mes joies ? Où sont les repas bruyants, plein de joie de se revoir avec des plats que seule je sais faire ? Hier, n’ayant très peu d’appétit pour manger et forcement pas de plaisir à préparer, le déjeuner bien que bon n’était pas à « ma hauteur », j’en avais fait le moins possible – pas en quantité – mais en recherche, en diversité.
Le baclofene m’a fait gagner un combat auquel je n’aurais jamais pu aller sans cette molécule, celle de l’indifférence totale à l’alcool.
Je sais que je n’aurais jamais pu être cette fêtarde qui boit quelques verres lors d’occasions et qui n’en touche plus un seul les jours suivants. Mais avoir changé de personnalité à ce point… Seule l’écriture et la lecture me restent encore.
Comme je regrette cette journée d’hier, quelle tristesse. Et je me rends compte que je réagis très peu à toutes les situations – très bonnes – bonnes – mauvaises ou très mauvaises. A 300. C’est probablement ça.
« Aux vieux et vieilles » : combien de temps vais je devoir rester à 300 ? Et forcément quand vais je pouvoir descendre ?
Bises à tous et à toutes
Et à toi Julie si triste