Je vais tout de même vous raconter un peu mon enfance et mon adolescence,
je viens de comprendre un certain nombre de choses.
Déjà petite, j'étais sans cesse comparée à mon frère, qui lui était calme, sage, et très agréable. Il a fait ses nuits très vite, pas moi...etc
Mais de toute façon, c'est un garçon

et je suis une fille

, alors
c'est bien normal!
Lui avait le droit de faire certaines choses, moi pas, parce que c'est un garçon, et moi une fille, alors...
Ça commençait bien.
J'ai jamais aimé être une fille. Comme c'est étrange.
Tu pleures? Tient prends toi une baffe, tu sauras pourquoi tu pleures. Heu!!!!
J'ai arrêter de pleurer.
Plus tard, on ne m'a jamais parlé, je restais seule dans ma chambre... Seule, c'est un état récurrent aujourd'hui encore.
J'étais invisible, les seules paroles étaient des reproches, pas assez ceci, trop cela, et range ta chambre, ... enfin rien de bien extraordinaire.
Mais toujours personne avec qui partager des moments sympa.
Plus tard encore,c'est le pompon! J'emménage chez mon père dans l'espoir d'y trouver un peu de communication, et de soutien.
Et bien je me retrouve au placard dans ma propre famille, étiquetée responsable de tous les maux de ladite famille.
On ne m'adresse même plus la parole, même pas pour les reproches. Mon tort? Exister!
Jusqu'à ce qu'on me dise tout simplement "on ne veut plus de toi, tu repars chez ta mère!".
Pas question! Je sais la galère qui m'attends à l'autre bout de la France, j'ai déjà donné.
Premier appartement à 17 ans, premières beuveries, premiers comportements à risque.
Bac en poche à 18 ans malgré tout (tout juste 10 de moyenne, mais c'est assez!).
Pas vu, pas entendu papa cette année là !
Je n'existais pas.
On m'a fait croire tout ce temps que c'était moi qui créais cette situation!
J'ai alors traversé la France dans le sens inverse. Direction Lille, la fac.
Ça se passe bien au début.
Mais je suis seule, je n'ai aucun soutien.
Et je n'arrive pas à me dépatouiller.
Début des soirées dans les boites belges, ou alcool et ecstasy coulent à flot.
C'est le seul moyen d'entrer en communication avec les autres. Communication somme toute restreinte, et dont les bases sont ... tangentes.
Je m'efforce de faire comme les autres, je copie des attitudes, des paroles, mais ça ne marche pas très bien!
Et puis je me plante en licence, et papa qui me répète constamment que je lui "coûte cher".
Ok! J'ai compris. Je fais mes valises et je traverse la Manche.
Ca se passe "à peu près" bien les 2 premières années. Encore que les comportements à risque sont bien installés, et récurrents.
Je suis persuadée que je ne vivrais pas au-delà de 25 ans, pourquoi 25 ans? Je ne sais pas au juste.
Quelques tentatives de retour en famille pendant cette période, pendant les fêtes notamment. Je découvre qu'on ne m'adresse toujours pas la parole.
Je dois être sacrément mauvaise! Je suis vraiment détestable.
Et puis la suite, je vous l'épargne, elle n'est pas plus intéressante.
Pour résumer, j'avais la possibilité de faire des études, de me hisser en-dehors de tout ce marasme, mais j'ai été incapable de soulever le boulet qui m’enserrait la cheville.
Ce boulet, c'est la croyance profondément ancrée que je ne vaux rien. J'ai donné raison à tous ces gens, le plus stupidement du monde. J'ai bien essayé de m'échapper, de m'envoler, mais mes ailes sont goudronnées. Je suis un goéland mazouté!
D'autres à ma place auraient su faire, c'est certain. Pas moi!
Et je continue de me détruire, patiemment (11 verres hier, il faut le faire!), obstinément.
Tu as raison Manue, il va falloir apprendre à être bienveillante avec moi-même!
Je suis bien consciente que cette histoire n'a rien de passionnant, que d'autres ont vécu des choses bien pires.Et pourtant, c'est mon histoire, elle explique ce que je suis aujourd'hui.
Il ne s'agit pas d'une course à "l'histoire la plus terrible",
il ne s'agit ni de me faire plaindre, ni d'étaler mes petits soucis à la face du monde.
Il s'agit juste pour moi de considérer les faits tels qu'ils se sont produits, et d'essayer de comprendre... où j'en suis!
Mettre un terme à ce cirque!