Ah oui, on monte, on monte dans l'euphorie de se débarrasser de la bouteille, à nous laisser "paisiblement" prendre la main par le baclo et par la bienveillance de tous ici.
La guérison et la clairvoyance des années perdues et des belles années qui nous restent.
La descente. Et on y croit à notre belle vie.
Et on se retrouve tout nu.
Le baclo qui continue à bien faire son boulot, mais en sourdine désormais.
Je retrouve celle que j'avais un peu oubliée durant ces longs mois d'espérance, durant ces quelques mois de béatitude à ne pas y croire d'avoir définitivement dit non au poison : moi.
Alors entre les EI de la descente et la redécouverte d'une personne renaissante, il faut gérer ces états pas très apaisés, dont on sait qu'ils ont toujours été là. Entre le baclo et soi-même, trouver l'équilibre à ne pas trop en vouloir ni à l'un ni à l'autre, à savoir reconnaître les torts de l'un et l'autre.
Retrouver le fil perdu.
Ca n'est pas si mal d'en parler aussi, de cet état d'homme nouveau, tant on n'y arrive pas si facilement que ça.
Et comme quoi, il n'y a aucun fil "qui ne sert plus vraiment".
Merci pour ton témoignage d'homme de l'après, Jack.
Pour ma part, j'en suis encore à courir après ma dose de confort, une course de plus d'espérance, à croire qu'une fois atteinte, la béatitude sera à nouveau là.
Mais je sais bien dans le fond qu'à moi non plus, tout au bout du chemin, le baclo, la nictoine et le petit verre de fin de journée ne seront pas suffisants.
Alors chercher encore.
La piste de la simplicité, oui, que j'explore doucettement à travers la pleine conscience. Ca fait un je-ne-sais-quoi d'apaisement. Sans trop me poser de question, je prends ce qui arrive.
Mais je freine, je freine, tant je crains un état un peu neutre, un peu trop monotone, car à la fin, quand même, je n'ai pas fait tout ça pour ne pas jouir un peu et ne pas profiter d'être folle tout en étant bien sobre.
Un équilibre à trouver sans doute là encore, au fil du temps. Peut-être qu'en étant en pleine écoute du monde qui nous entoure, on arrive au final à jouir davantage.
Je m'aperçois aussi qu'agir n'est pas seulement un pis-aller à panser nos pensées trop en nombre, mais une façon aussi de calmer les angoisses. Etre dans l'action permet parfois, une fois posée, d'avoir l'esprit plus clair et plus dégagé.
Et le partage aussi contre la solitude, pas les fausses amitiés nouées accoudé au bar, pas ces relations de mal-être, quand nous n'étions pas bien solides, à nous interroger sur le pourquoi nous ne sommes pas comme eux, à ne voir que le jugement dans les yeux des autres.
Non, le vrai partage, à se savoir peut-être différent, mais bienheureux de l'être, à aimer bien les autres, à aimer beaucoup cet autre, pour se comprendre mieux et s'aimer un peu plus.
Pfffiuuu...La tâche semble bien rude et qu'il n'est pas fastoche de vivre sans la bouteille.
Alors rêver un peu à n'être qu'un poilu, pas celui des tranchées, non, un vrai poilu fait chat, mon chat.
Un modeste bol de croquettes, un peu d'eau de pluie tombée dans une rigole, le bonheur de chasser la souris, de surveiller longtemps une mésange rieuse, de se balader patte contre patte avec une bonne minette, de se tanner le cuir avec le pire ennemi d'en face, le poilu de la voisine, tapi dans l'ombre de la tranchée ennemie, et dormir au soleil, dans une cabane en carton, dormir quand bon nous semble.
Peut-être que dans une autre vie, tout cela nous suffira-t-il.
Pour l'heure, le rêve a ses limites.
A moins qu'il ne suffise d'un impromptu de Schubert, joué au piano sans tristesse ni joie, juste dans l'instant présent, pour juste se sentir bien.
A moins qu'il ne suffise d'un post allongé, posté un vendredi, alors que la lumière décline, pour juste se sentir mieux.
Des instants de bien-être qui feront peut-être, au final, toute une éternité.