Coucou
Ça fait un moment que je n'ai pas posté sur mon fil et je réalise clairement, après relecture de mon témoignage ci-dessous, que j'ai largement compensé mon absence :-)
Bienvenu sur mon fil et bonne lecture !
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J'apporte ici mon témoignage, mon cheminement, qui décrit comment et pourquoi ma maladie a pu évoluer très favorablement puisque, aujourd'hui, je ne bois que l'équivalent d'un ou deux verres de vin par semaine.
Depuis mon nouveau protocole mis en place début février (très grosses prises de baclofène dès 8h00 pour cibler un premier craving, voire une consommation, dès la mi-journée), au fil des jours et des semaines, ma consommation
s'était nettement déplacée vers la fin d'après-midi. Ma consommation
avait surtout nettement baissé également.
Pour être honnête, cela s'explique surtout par le fait que je dormais beaucoup la journée (gros EI d'endormissement).
Donc, en toute logique, gros dodo diurne = début de consommation retardée = quantité d'alcool à la baisse.
Mais je pense que ce sommeil lié aux EI (sous un fond dépressif aussi, j'avoue) a été finalement, avec le recul, un grand mal pour un grand bien quant à ce qui allait suivre, comme une mise en repos de mon corps (et de mon cerveau aussi), une sorte de cure de désintoxe pour rebondir sur autre chose, comme un tremplin.
Cette baisse manifeste de ma consommation a eu un effet d'encouragement d'un point de vue psychologique : je réalisais tout simplement que ma bouteille pouvait ne plus être systématiquement vidée en un seul jour, mais en deux jours, puis, un peu plus tard, en trois jours même, et ainsi de suite. C'est ce tremplin-là qui a encouragé et déterminé la suite de mon parcours vers une baisse constante de ma consommation qui se poursuit et se maintient encore aujourd'hui.
Voici donc "mes petites trucs à moi". Ces petites astuces, très personnelles, que je livre ici, modestement et sans prétention, avaient pour objectif principal d'aider la molécule Baclofène à bien imprégner mon cerveau, car visiblement le mien semble être particulièrement récalcitrant (pour rappel : 350 mg/jour jusqu'en février - 270 mg aujourd'hui, depuis fin avril)
Voyant ma consommation baisser à cause des EI, j'ai commencé à noter l'initiale du jour de la semaine sur ma bouteille fraichement débouchonnée de manière à simplement observer la durée de vie de cette bouteille. Et, aussi naïf que cela puisse paraître, cette petite lettre inscrite discrètement dans le coin, en haut à droite, de l'étiquette de ma bouteille, ne me servait pas uniquement de jauge, de constat de la situation, mais elle allait aussi m'apporter un point d'appui concret et visible. Tel un prisonnier qui grave sur le mur de sa cellule le décompte des jours écoulés avant sa libération, moi j'élaborais aussi un système de comptage sur ma bouteille, représentation matérielle de mon boulet de forçat à moi.
Quelques bouteilles gravées d'une initiale plus tard, je me suis essayée à relever le petit défi - une gageure plutôt - de voir si je pouvais faire mieux la fois suivante, c'est-à -dire essayer de gagner un jour de plus sur ma bouteille entamée avant d'en débouchonner une autre.
C'est ainsi que j'ai décidé que j'allais soumettre mon virus à moi (ma bouteille) à des horaires de sortie que j'aurai définies (= début de consommation) mais aussi à un couvre-feu à respecter (= fin de consommation) !
Au bout de plusieurs jours, une fois mon cerveau habitué à cet horaire d'autorisation de sortie, je décidai de décaler progressivement, pas à pas et à un rythme supportable, un nouvel horaire de sortie de ma bouteille, de quart d'heure en quart d'heure et par paliers de plusieurs jours entre chaque changement.
Surtout jamais aucune pression que je ne puisse accepter ou supporter, non, non non. Cela aurait eu tendance, au contraire, Ã un effet inverse.
Au début, quand je m'apercevais que j'étais en train de guetter l'heure et que ça me faisait mal (boule au ventre ou craving), je prenais un demi anxiolytique (Alprozolam 0,25) et du coup, je me détendais si bien que l'envie de boire passait plus longtemps que prévue même !
En toute honnêteté et comme déjà dit, je n'aime pas du tout ces petits bonbons-là … mais je suis passée par-là par nécessité. Cette béquille provisoire m'a été bénéfique. Je n'en prends plus du tout aujourd'hui.
Repousser progressivement mon passage à l'acte a eu une sacrée incidence sur mon coquin de cerveau : mon cerveau a une horloge dans la tête (!) et il avait imprimé le top départ tout comme le signal de la fin. Le cerveau se souvient de tout d'ailleurs - j'y reviendrai plus bas.
Quant au couvre-feu, l'heure à laquelle ma bouteille devait se confiner, aucun souci pour moi car depuis septembre 2020, je ne bois jamais après le repas du soir, pas au-delà de 20h30- 21h00 grand maximum. Chez moi, le couvre-feu de ma bouteille est ancré dans mon cerveau depuis suffisamment longtemps déjà pour qu'il se consolide naturellement.
Oui, petit à petit, ça marchait : à chaque fin de bouteille, je réussissais à grignoter un petit peu de temps (précieux) et à retarder la vitesse de descente du niveau du liquide délicieusement empoisonné qui se trouvait dans ma "
jolie bouteille, sacrée bouteille" ***. Au début, pas grand chose, juste un jour de plus de la semaine puis, plus tard, un deuxième …
Me prenant au jeu, je commençais à devenir un adversaire de taille, à bien m'approprier les règles du jeu et pas mal dominer les parties suivantes même puisque la longévité de ma bouteille augmentait sensiblement au fil des semaines et des mois.
En fait, c'était juste une manière concrète de voir, dans mon parcours, "le fruit de mes efforts" comme on dit, mais "sans efforts insurmontables" justement désormais (et c'est ça qui est fort et encourageant…)
J'ai cessé ce petit truc lorsque ma bouteille durait plus de 10 jours. Aujourd'hui, une bouteille de vin moelleux dure plusieurs semaines.
Une autre astuce pour consommer moins, c'est que je me sers toujours par demi verre, voir moins même. une petite dose à la fois, un peu comme si c'était un bon vieux digestif, une eau de vie pure, et pas un simple vin à 11% d'alcool. Je n'utilise jamais de verres à vin, mais un verre à eau pas trop haut. Mes verres à pied sont confinés au placard, ce qui est significatif, au moins psychologiquement, pour mon cerveau.
Mais aussi, depuis longtemps, j'ai appris à ne plus "boire" de l'alcool, mais à le "siroter".
C'est une différence majeure puisqu'en buvant très lentement, le verre se vide forcément moins vite, je vais donc moins rapidement le remplir.
En fait, je sirote volontairement mon verre de vin comme si dans ce verre se trouvait un truc hyper puissant et hyper concentré que tout un chacun ne boirait que très lentement. Je sirote toujours également en faisant une chose qui captive mon attention et ma concentration et qui me fait plaisir surtout (moi, personnellement, j'ai déniché sur un site un jeu de lettres auquel j'accroche et j'y trouve un intérêt car je progresse bien)
Voilà , c'est la somme de ces petites astuces, de ces satisfactions qui en découlent, qui encouragent la réussite de mon traitement avec le Baclofène et me permettent, aujourd'hui et concrètement, de consolider une très faible consommation d'alcool.
Aujourd'hui la boisson que je bois le plus dans la journée, c'est de l'eau pétillante à laquelle j'ajoute parfois du citron (vous savez, la fameuse "Dame Pétillante" de D-Day, et bien c'est la même !)
L'alcoolisme est un très grand mot et on se sent tout petit pour vaincre ce colosse qui nous domine depuis des (dizaines d') années. Sa représentation matérielle, l'objet bouteille, devient, lui, un objet de combat bien davantage à ma portée, je peux me mesurer à cet adversaire-là , accessible. Petit à petit. Un pas après l'autre. Un jour après l'autre.
Oui, je me soigne de son alcoolisme en me mesurant consciemment à sa représentation matérielle, l'objet bouteille.
Car aussi, cela me permet de retirer définitivement un énorme poids de culpabilité que j'endossais seule auparavant lorsque je m'adonnais à une alcoolisation excessive. Désormais, toute cette culpabilité est reportée sur l'objet bouteille, plus sur moi. Cela m'allège et me rend un peu plus forte dans mes pensées et mes actions car libérée de ce poids-parasite.
A des moments où il a pu être difficile de contrôler ma bouteille, je me rappelais cette idée aussi simple que cruciale : ma bouteille vient de l'extérieur, elle fait partie des "visiteurs". Quant à moi, je joue à domicile, c'est donc moi qui fixe les règles de mon jeu auquel elle est en position d'invitée seulement. Grâce à cela, j'ai gagné confiance en moi au fur et à mesure que ma consommation baissait.
Je me suis installée une espèce de ligne de conduite douce au fil des jours, avec des petites astuces (pas de dogme rigide) que je ne perçois pas comme des contraintes puisque c'est moi qui décide quand et comment, mais que je considère comme des éléments aidants, des adjuvants pour me soigner, et au service du Baclofène.
Finalement, ce que j'appelle "des petits astuces", ce sont ni plus ni moins des petites
habitudes personnelles que je me suis appropriées et qui viennent renforcer mes défenses immunitaires contre mon virus, en bouleversant avec douceur et bienveillance même des mauvaises habitudes d'autrefois ancrées en moi depuis trop longtemps.
Cette citation de Marc Twain glanée un jour, par hasard, sur le fil "Pensées positives ou citations" du forum (merci Kor !), prend alors tout son sens : "On ne se débarrasse pas d'une habitude en la flaquant par la fenêtre ; il faut lui faire descendre l'escalier marche par marche".
J'ai appris des choses importantes durant mon parcours.
Chaque profil de malade alcoolodépendant est différent, selon ses habitudes d'alcoolisation bien sûr (nature, quantité, fréquence, horaires, lieux, seul ou en société) et selon aussi son caractère, son environnement actuel, son histoire propre, son quotidien à assumer, ses peurs, ses rêves, … Le "pourquoi je bois" est fondamental aussi.
Cela dit, à la lecture des témoignages de notre forum depuis des années, j'ai pu repérer deux grands profils distincts parmi les utilisateurs du baclofène.
On trouve, d'une part, les patients qui commencent leur traitement tout en continuant leur consommation d'alcool, atteignent leur dose seuil de baclofène relativement rapidement et facilement et ressentent tout aussi aisément la fameuse indifférence à l'alcool qui leur permet la délivrance de leur addiction.
Et puis, il y a les autres qui, eux, ont besoin de passer par une certaine abstinence physique totale et radicale et continuer de laisser le baclofène agir sur le craving.
En ce qui me concerne, je partage le mode de fonctionnement de plusieurs baclonautes ici : pour m'en sortir, je me dois de viser (au plus près de) l'abstinence.
Ces baclonaupotes-là (comme Gavroche, Kobobuser, Sablon, Athelstan ou Haddock) ont décrit dans leur expérience mon type de profil : "Si je m'autorise un peu d'alcool, je ne sais pas si je saurai gérer ce "un peu" tous les jours". En témoigne ma rechute il y a pile un an, en mai 2020 …
En réalité, je n'aime pas tellement ce terme d' "abstinence" car sa définition même signifie une "privation". Je préfère largement l'expression de
non-consommation utilisée par Gavroche ;-)
Car, allez dire à un alcoolodépendant depuis des (dizaines d') années comme moi qu'il doit subitement se séparer d'un produit alors que ce produit qui, comme toute addiction, est l'
essence même de ses actions, au sens propre (comme au figuré), c'est à dire son
carburant pour faire fonctionner son
moteur (corps et esprit) qui lui permettra d'agir au quotidien, d'avancer dans sa vie, de vivre sa vie comme les autres finalement.
Personnellement, je me connais et je ne suis pas capable de me plier à une abstinence physique totale et radicale du jour au lendemain. C'est pourquoi j'ai plutôt adopté une "abstinence psychologique", c'est-à -dire une action partielle et progressive mais le désir de m'abstenir de boire est très présent quand même.
Mon traitement médical avec le baclofène s'est donc accompagné, pour moi, par une "non-consommation active", c'est-à -dire, "Je pense à ne plus boire", quelque chose de voulu et de conscient, mais tout en gardant ma bouteille chez moi.
Les astuces que je me suis élaborées m'ont permis de ne pas culpabiliser quant à mon incapacité à être entièrement abstinente du jour au lendemain. Ces petites astuces ont été de véritables marches d'escalier qui m'aident à y parvenir, à parvenir au plus près du "zéro consommation" où je me trouve actuellement.
Aujourd'hui, je peux dire que mon espèce d'abstinence programmée par étapes est devenue une "non-consommation passive", c'est-à -dire, "Je ne pense plus à boire", sans efforts insurmontables, naturellement. L'alcool ne prend plus une place importante dans mon quotidien aujourd'hui.
Aujourd'hui, tous les indicateurs de mon dernier bilan sanguin sont au vert. Je n'ai plus aucun craving la journée. Peut-être un très léger craving entre 19h et 19h30 qui, soit passe tout seul en m'occupant (et c'est alors 0 conso ce jour-là ), soit passe en prenant mon repas (donc 0 conso), soit ne passe pas et alors je me sers un demi verre de vin qu'il m'arrive de ne même pas finir. Les jours où je suis trop tendue par mes démarches administratives, il m'arrive de boire un verre en deux fois, jamais envie de plus.
Alors je vous entends déjà penser : "Bravo, Malex ! C'est formidable !" ou encore "Félicitations, Malex, tu peux être fière de toi !" Et oui, je suis bien contente ! :-)
Mais, aujourd'hui, pour autant, je ne me sens pas guérie.
La seule certitude que j'ai, ô combien positive, c'est que ma tolérance à l'alcool s'est largement inversée. Je sais qu'aujourd'hui, je ne suis plus alcoolo dépendante.
Mais ce dont je suis certaine pardessus tout, c'est qu'il me faut stabiliser cet état et le pérenniser.
Non, je ne crierai pas victoire comme l'an dernier, presque jour pour jour, alors que je n'avais pas touché à l'alcool pendant une dizaine de jours.
C'est curieux, je ne sais même pas si je suis "indifférente".
Je reste très prudente et je ne tenterai pas mon démon en dehors de ses heures de sortie, par exemple.
Ou encore je ne tenterai pas mon démon en revenant à mon alcool préféré, le vin rouge. (
Ahhh ! Un bon Graves à l'apéro ou à table …)
Mon cerveau risquerait de me jouer des tours, je pense.
Donc, non, définitivement, aujourd'hui je ne me sens pas guérie pour autant.
Dans la période la plus sombre de ma maladie, entre fin 2013 et mi 2014, je commençais ma journée (non travaillée et sans mes enfants) non pas avec un café-clope, mais par un rhum-clope ou un whisky-clope …
Je connais la bienveillance de notre forum et je sais bien que je ne serais pas jugée sur cet épisode de ma vie. C'est surtout pour dire que je viens de loin. J'ai un passif très chargé.
Jusqu'en février 2021, je cédais à la bouteille de vin dès 15h30, voire bien plus tôt parfois. Je consommais (souvent bien plus d') une bouteille par jour.
Lorsque j'ai commencé à entrer dans la spirale de l'alcool, je buvais d'abord par plaisir. Puis par stimulation aussi.
Ensuite, j'ai inévitablement augmenté au fur et à mesure ma dose pour ressentir ces effets de plaisir et de stimulation de la première fois, le fameux circuit de récompense. Le premier verre était plaisir, les suivants étaient stimulation.
Tout ceci, dans un contexte de vie avec ses hauts et ses bas, mais surtout avec une vie familiale et une autre professionnelle à assumer à la perfection tout en étant séparée, en s'appuyant sur ce soutien-poison et qui accentue du coup encore plus cette tolérance à l'alcool.
Le cerveau pardonne mais il n'oublie pas.
Notre cerveau se souvient de nous avec nos excès.
Il garde tout en mémoire, et à long terme. Pas de reset possible.
Je pense qu'un malade qui a connu l'alcoolisme a un un cerveau qui restera toujours avec une certaine faille - faille d'ailleurs que seul le Baclofène peut combler aujourd'hui. J'en suis consciente et je ne négocierai pas avec mon démon.
Aujourd'hui, je pense que mon cerveau est en cours de cicatrisation du mal, des habitudes, qu'il a dû endurer avec l'alcool et je pense que ma maladie est en phase de rémission.
Je ne parlerai de guérison que dans quelques années, et avec le même
statu quo, lorsque mon cerveau deviendra, en quelque sorte,
addict à la sobriété, comme le dit joliment Kobobuser ;-)
Actuellement je prends 270 mg de baclofène par jour, répartis en 3 fois 90 mg à 14h00, 16h00 et18h00. (Bien sûr, avant d'en arriver là , je suis passée par d'autres étapes)
Je n'ai pas envie de baisser le Baclofène pour le moment. Je n'ai aucun EI.
Je continue donc ma descente de l'alcool avec une consommation naturellement sous contrôle et limitée à maximum deux verres par semaine et je vais bien !
A bientôt !
PS en chanson ;-)
*** jolie bouteille, sacrée bouteille :
https://www.youtube.com/watch?...nnel=germain696